La Réserve de chasse et de faune sauvage du Hâble d'Ault (RCFS) est située dans les bas-champs, au sud de Cayeux-sur-Mer. Les activités de chasse y sont interdites. La pêche peut y être autorisée après autorisation par la DDTM (direction départementale des territoires et de la mer). Créée en 1982, elle s'étend sur une surface de 74 hectares, sur le territoire de deux communes limitrophes : Cayeux-sur-Mer et Woignarue. Les propriétaires de la réserve sont l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, le Conservatoire du littoral et dans une moindre mesure, la commune de Cayeux-sur-Mer.
Autour de ces 74 hectares, une zone tampon de 224 hectares bénéficie d'une protection complémentaire.
Idéalement placée sur les chemins migratoires, éloignée des grands axes de circulation, dépourvue d'urbanisation, la réserve est un lieu de tranquillité recherché par les oiseaux. Elle accueille de très nombreuses espèces en hivernage, en période de nidification ou simplement en halte migratoire, tout particulièrement au printemps. 268 espèces d'oiseaux différentes y ont été recensées (en point de comparaison, 370 espèces ont été répertoriées sur l'ensemble du littoral picard depuis un peu plus d'un siècle).
La végétation y est clairsemée et basse, parsemée de zones humides et de plans d'eau. Sa particularité tient à la forte densité de galets dans le sol. Les embruns et le vent modèlent le paysage, d'une étonnante planitude, et marquent les espèces végétales. Seules subsistent celles qui savent y résister. Roselières, prairies légèrement salées, gazons amphibies, plans d'eau légèrement saumâtre, la végétation qu'on y recense est d'intérêt patrimonial.
Les Bas-champs sont séparés de la mer par une très longue digue de galets, renforcée par des épis de béton, et qui relie Ault à Cayeux-sur-Mer.
La réserve est attentivement suivie. Un plan de gestion 2018-2022* a été élaboré avec les différents partenaires (Office national de la chasse et de la faune sauvage, Syndicat mixte baie de Somme grand littoral picard, Conservatoire du littoral, commune de Cayeux-sur-Mer et commune de Woignarue). Il prend en compte le suivi de la réserve, mais aussi les objectifs, les projets, les actions programmées pour préserver son caractère naturel et la richesse de sa biodiversité. Il s'agit par exemple d'entretenir les îlots très bas et dénudés qui accueillent certains oiseaux nicheurs ou de limiter l'impact des goélands et des cormorans qui se développent au détriment d'espèces plus fragiles. D'autres actions consistent à entretenir les clôtures pour assurer une plus grande quiétude pour les oiseaux reproducteurs.
Un cheminement balisé, des panneaux explicatifs, des observatoires aménagés permettent au grand public d'observer les oiseaux en limitant le dérangement.
Un peu d'histoire :
Au moyen-âge, le Hâble d'Ault, qui n'était pas encore fermé par une digue, avait la réputation d'être le plus grand centre de pêche du nord de la France. La pêche y était fructueuse pour une raison simple : il suffisait de barrer le chenal par lequel la mer entrait dans les Bas-champs pour capturer, à marée descendante, de belles quantités de poissons. Un peu plus tard, Vauban avait projeté d'y construire un port de guerre. Plus tard encore, on imagina en faire un port de commerce. L'idée fut abandonnée.
Au XVIIIème, au XIXème siècle déjà, le Hâble était particulièrement prisé par les chasseurs et les naturalistes. Au delà de la réserve, dans ce vaste espace, on trouve aujourd'hui des huttes de chasse disposées en bordure de mares, des prairies humides pâturées par des races bovines rustiques ou des chevaux hensons. D'autres parcelles sont cultivées. Les Bas-champs s'étendent sur une surface triangulaire, entre Cayeux, Ault et la falaise morte d'environ 4200 hectares.
Et d’étymologie … le H(â)ble avec accent ou pas ?
Doit-on écrire Hâble ou Hable ? Le terme s’apparente à l'idée de petit port, de havre (comme le havre de paix) qui lui-même viendrait du néerlandais « haven » ou de l'allemand "hafen" qui signifie « port ». Dans la même racine, on trouve l'anglais "harbour". Généralement, la langue française actuelle a placé un accent circonflexe là où un "s" ou un "x" ancien s’effaçait ("hôpital" de l’ancien "hospital", "fête" de l’ancien "feste", "dîme" de l'ancien "dîme"…), ce qui n’est pas le cas pour notre « Hable ».
Sur cette carte, datée de 1816 et consultable sur le site des Archives départementales de la Somme, le "Havre d'Ault" désigne le courant d'eau qui traverse les Bas-champs.
Sur la carte de Cassini (exemplaire dit de "Marie-Antoinette" du XVIIIème siècle, consultable sur Géoportail) le Hable est aussi un cours d'eau qui serpente dans les Bas-champs.
Anatole Mopin, maire de la ville de 1908 à 1940, auteur de l’Histoire de Cayeux (éditions la Vague Verte) ne mettait pas non plus d’accent. Pas plus que l’universitaire Fernand Verger ou que l’écrivain Henri Heinemann.
Plus près de nous, les textes officiels régissant cet espace naturel ont fixé l’accent circonflexe. C’est le cas de l’arrêté préfectoral instituant la réserve de chasse et de faune sauvage du Hâble d’Ault signé en 1982 ou de l’arrêté préfectoral portant création d’une zone de protection de biotope au Hâble d’Ault signé en 2016. Dans le plan de gestion de la réserve co-élaboré en 2018 par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, le Syndicat mixte baie de Somme Grand littoral picard, le Conservatoire du littoral, les communes de Cayeux-sur-Mer et Woignarue, on lit "Hâble", avec accent circonflexe.
Dans la même forme d’écriture, la page wikipédia qui traite du Hâble d’Ault y met un accent, tout comme Google Map ou les sites internet du Muséum d’histoire naturelle, du Conservatoire du littoral ou celui des Archives départementales. Le Courrier Picard a posé aussi un chapeau. À l’intérieur des pages d’un même site, d'un clavier à l'autre, d'un auteur à l'autre, l’orthographe peut cependant varier.
Les ouvrages ornithologiques de Philippe Carruette, ceux de Patrick Triplet ou les guides de randonnée de Christophe Lépine, des ouvrages édités par Picardie Nature ont également opté pour l’accent.
En français, comme nous l’écrivions plus haut, l’accent circonflexe peut marquer l’amuïssement d’une ancienne lettre. Il peut aussi distinguer des homophones ou alors préciser la prononciation d’une voyelle. Le "a" pour ce qui nous concerne.
Alors pouvons-nous émettre une hypothèse : dans l’usage contemporain où l’accent circonflexe sur le « a » de notre Hâble semble progressivement s’imposer, à l’opposé de l’usage historique, sans doute a-t-il pour fonction d’en indiquer la prononciation. Tout comme « hâbler » [hâ-blé] qui signifie « parler avec vanterie, avec exagération ». On dit plutôt le Hâble [ɑ:bl] d’Ault que le Hable [a:bl] d’Ault. Une manière d’aider nos visiteurs venus d’autres régions qui n’en connaissent pas l’usage 😊.
Alors, l’Académie Française n’ayant pas encore statué, à vous de choisir… les textes officiels actuels ou l’histoire… !
Pour en savoir plus sur une espèce emblématique du Hâble d'Ault et de Cayeux-sur-Mer :
Et en bonus, mettez le son, ouvrez grand les yeux et les oreilles, on vous emmène visiter le Hâble, au milieu des oiseaux :
Le saviez-vous ? À l'automne 2020, une opération de pêche sélective a été organisée sur le plan d'eau principal de la Réserve du Hâble d'Ault (RCFS). L'objectif : limiter la prolifération de poissons herbivores qui, par leur surdensité, font de l'ombre ... aux oiseaux d'eau !
Reportage et explications, en images :
Délimitations de la réserve et de sa zone tampon :
* Plan de gestion 2018-2022 - Réserve de chasse et de faune sauvage du Hâble d'Ault et sa zone tampon - Patrick Triplet, Nathalie Chevallier, Stéphanie Ritz, Benjamin Blondel, Hervé Leu.
Arrêté instituant réserve de chasse et faune sauvage
Arrêté de protection de biotope-APB Hâble d'Ault
Cayeux-sur-Mer, mercredi 27 janvier 2021, 17h30. Mis à jour dimanche 31 janvier 10h